Le discours sur la physiognomonie
La physiognomonie traite du rapport entre les qualités intérieures et la figure extérieur. Tout l’extérieur est l’expression de l’intérieur. Toutes les qualités de l’âme et de l’Esprit s’expriment par quelques traits au dehors. La physiognomonie a été très connue au XIXe siècle, en particulier, avec les thèses du criminologue Lambroso sans son ouvrage L’Homme criminel. Cette pseudoscience a été profondement critiquée par le corps médical, scientifique et, notamment, par des philosophes.
Hegel est l’un des philosophes qui se livrent à une critique de la physiognomonie. Pour lui, la physiognomonie cherche la conscience de soi où elle ne peut pas être, dans le corporel, ses manifestations extérieures. Il n’y a pas de stricte équivalence nécessaire entre la conscience et ses manifestations. L’âme n’est pas réductible à ses manifestations corporelles. Par exemple, un même état de la conscience peut avoir les manifestations diverses ou deux états différents de la conscience peuvent avoir la même manifestation. Donc, l’erreur de la physiognomonie est de prétendre déchiffrer une intériorité, les signes d’une intériorité.
Malgré les échecs, le caractère chimérique de l’interprétation du visage, la physiognomonie reste intéressante. Selon Gombrich, le travail du peintre vers l’essentiel consiste au déchiffrage de l’identité à travers le processus de schéma et correction. Cette adaptation au détails caractéristiques de l’image réelle permet l’artiste de partir d’une idée ou d’un concept et non pas d’une impression visuelle. Or, la physiognomonie aide à comprendre des traits schématiques et des visages qui sont simplifiés aux types. Pour expliquer ce qu’on entend par schéma dans l’ordre de la représentation scientifique, il est intéressant de partir de la vogue du portrait en silhouette. Le terme silhouette est défini comme un dessin au trait de profil, suivant l’ombre, projeté par un corps ou un visage. Pour Lavater, la silhouette est l’image la plus fidèle, puisqu’elle est reproduction immédiate de la nature. Elle est comme la structure fiable qu’on peut déchiffrer parce qu’elle rende l’observation permanente. Elle est précise, facile et simple. Lavater constate que la physiognomonie n’a pas de preuve plus sûre de sa vérité objective que des silhouettes. Alors que pour Lavater la silhouette est le portrait le plus fidèle, pour Topffer, la silhouette et la physiognomonie en général sont les moyens de faire surgir un caractère déterminé d’une personne. N’importe quel dessin du visage possède un caractère déterminé que le spectateur incline identifier. Cela explique la spontanéité de jugement qui peut être trompeuse. Comme Topffer, Diderot souligne qu’il faut établir une distinction entre le caractère inévitable du déchiffrage de l’interprétation et son caractère infaillible. En d’autres mots, on ne peut pas appliquer cette cognition et classement infaillible dans le processus artistique. Donc, l’imitation directe et immédiate de la nature est une utopie puisque aucun bon portraitiste ne pourrait parvenir à cette production.
En conclusion, il ne faut pas chercher la science dans la physiognomonie. Pourtant, malgré la critique de la physiognomonie il est vrai qu’elle manifeste une part de vérité. La physiognomonie apparait comme un code artistique, une manière d’interprétation du visage.
Bibliographie :
- Cesare Lombroso, L’homme criminel. Étude anthropologique et médico-légale, 1887
- E.H. Gombrich, The Mask and the Face: The Perception of Physiognomic LIkeness in Life and in Art, Phaidon, Oxford, 1982
- Hegel, Phénoménologie de l’esprit, 1807
- Lavater, Physiognomische Fragmente zur Beförderung der Menschenkenntnis und Menschenliebe, 1775
- Rodolphe Töpffer, Essai de physiognomonie, 1845